A la Marquise

Pierre Corneille

Marquise, si mon visage
A quelques traits un peu vieux,
Souvenez-vous qu’à mon âge
Vous ne vaudrez guère mieux.

Le temps aux plus belles choses
Se plaît à faire un affront,
Et saura faner vos roses
Comme il a ridé mon front.

Le même cours des planètes
Règle nos jours et nos nuits
On m’a vu ce que vous êtes;
Vous serez ce que je suis.

Cependant j’ai quelques charmes
Qui sont assez éclatants
Pour n’avoir pas trop d’alarmes
De ces ravages du temps.

Vous en avez qu’on adore;
Mais ceux que vous méprisez
Pourraient bien durer encore
Quand ceux-là seront usés.

Ils pourront sauver la gloire
Des yeux qui me semblent doux,
Et dans mille ans faire croire
Ce qu’il me plaira de vous.

Chez cette race nouvelle,
Où j’aurai quelque crédit,
Vous ne passerez pour belle
Qu’autant que je l’aurai dit.

Pensez-y, belle marquise.
Quoiqu’un grison fasse effroi,
Il vaut bien qu’on le courtise
Quand il est fait comme moi.

Pierre Corneille

Imprimer ce poème

47 commentaires sur “A la Marquise”

  1. Barbara

    dit :

    Pour répondre à Nicolas : le poète ne pense pas que la dégradation de l’esprit accompagne obligatoirement la dégradation du corps puisqu’il pense avoir encore des atouts pour plaire, qui ne sont plus les atouts physiques, ainsi qu’il le reconnait dès le début du poème.

  2. Allego

    dit :

    Quelle barbe les donneurs de leçons…

    Quelle barbe les feminisres stupides tout en posture.

    A chacun son « analyse » du fond…

    Mais LA LANGUE ….WOUAH !

  3. Patrick BATON

    dit :

    Peut-être que je serai vieille,
    Répond Marquise, cependant
    J’ai vingt-six ans, mon vieux Corneille,
    Et je t’emmerde en attendant.

    (réponse de la jeune bergère au vieux berger…
    Tristan Bernard)

  4. Mylène Di Nardo

    dit :

    À lire et relire !!!

  5. Vincent

    dit :

    « Vous ne passerez pour belle
    Qu’autant que je l’aurai dit. »

    Personnellement, cela me rappelle :
    « Lors vous n’aurez servante, oyant telle nouvelle
    Déjà sous le labeur à demi sommeillant
    Qui au bruit de Ronsard ne s’aille réveillant » etc.

    La beauté passe, la gloire apportée par le poète, elle, demeure. Machiste, je ne sais pas, mais plutôt content de lui, (en tant que poète) !

  6. Félix

    dit :

    @Lefrançois/ même si Corneille n’aurait connu que le géocentrisme les astres et surtout les planètes avaient des cours si régulier qu’il servaient depuis longtemps de base de temps

  7. Jean-Paul

    dit :

    Oui , Brassens l’a chanté, seulement le début mais en terminant par la réponse de Marquise. J’ai assisté à un concert de Brassens à Paris. Extraordinaire souvenir.

  8. MadarFan

    dit :

    Je pense que ce poème est à la fois autant une tentative désespérée de séduction de la part du poète mais aussi une sorte de vengeance faite à la gente féminine par laquelle il à surement été déçu à cause de son physique disgracieux tout au cours de sa vie. Ce magnifique texte est donc pour lui une manière de se réaffirmer face aux femmes qui ont sans aucun doute brisées toute l’estime qu’il avait pour lui même, ce qui m’amène à penser que derrière ce déferlement de violence se cache peut être un cris de détresse.

  9. Anonyme ;)

    dit :

    Ce poème est vraiment magnifique ! J’ai adoré la troisième strophe ! ♡

  10. Lefrançois

    dit :

    Il est vrai qu’avec ce poème on arrive à un point culminant de la langue française. A savoir un mélange de simplicité, de rigueur et de beauté. « Le temps aux plus belles choses se plaît à faire un affront » En simplement douze mots on explique la vieillesse. Mais ce qui m’intrigue le plus c’est « le même cours des planètes » Galilee venait de montrer que c’est la terre qui tourne autour du soleil (à ses dépends) et je me demande comment Corneille peut ainsi associer le temps et le cosmos. Ce qui pouvait gêner l’église à l’époque. Je ne serait pas fâché que l’on m’éclairât.

  11. Centdoute

    dit :

    Corneille est admirable par son sens de la formule, ce poème n’est fait que de cela, pour les citer il faudrait rappeler ici tout le poème… Cependant dans les deux derniers vers :

    « Il vaut bien qu’on le courtise
    Quand il est fait comme moi. »

    Corneille ne laisse aucun doute sur la considération qu’il se porte. Il affirme avec autorité l’attitude que la belle Marquise devrait faire montre à son égard.

  12. Christian

    dit :

    Il m’arrive quelque fois de me réveiller le matin avec les premiers vers en tête… C’est comme un refrain qui m’obsède et ne me quitte pas. On peut analyser ce poème de différentes façons, mais, la seule que je retiens : Marquise, la courtisane, a plutôt mal vécu le temps jusqu’ici, personne ne la connaît, le poème, lui et sa mélodie ont traversé les siècles. Patrimoine des arts, des lettres et de la France

  13. Antoine ASSI

    dit :

    Pourquoi les pauvres d’esprit parlent de machisme, les angoissés de la vieillesse et du temps qui passe évoque leurs démons… et personne ne voit la beauté du texte, la musique qui en découle et les soupirs d’un papillon éperdu d’une libellule…

  14. Marie Alice Namrit

    dit :

    Bonjour, je ne suis pas calée en poésie, mais pourtant comme j’adore ! En particulier celui-ci que j’ai découvert par hazard sur le mur d’une classe. Merci pour tous vos beaux commentaires.

  15. MTL,

    dit :

    Magnifique poème, comme c’est bien dit, quel beau langage patati et patata. Eh bien, qu’il soit écrit et dit n’importe comment, il reflète une grosse amertume et une grande vexation. En effet, il commencait à ressembler à une vieille corneille qui se déplume, et Marquise était comparable à un jeune oiseau des iles. J’adore la conclusion de Marquise, enfin, celle qu’on lui prete : j’ai 26 ans, mon vieux corneille et je t’emmerde en attendant. Mon dieu, comme c’est bien répondu.

  16. Adn

    dit :

    La beauté physique passe avec l’âge mais l’oeuvre du poète perdure et a traversé les siecles. Personne ne connaîtrait Marquise, la courtisane, si Corneille n’avait écrit ce poème.

  17. M

    dit :

    J’ai connu ce poème en dehors des cours de français pour lesquels pourtant j’avais de l’intérêt. Connu par Brassens. C’était mon professeur d’école buissonnière à 16 ans. Je ne l’oublierai jamais…

  18. GILBERT ASENJO

    dit :

    J’ai 80 balais, donc mon commentaire un peu subjectif… guidé par la reponse de Voltaire à Madame de Chatelet qui était traumatisée par l’age (surtout le sien). Malgré son inflexible rigueur tirons au moins quelques avantages qui n’a pas l’esprit de son age, de son age a tout les malheurs.

  19. Éliane armand

    dit :

    J’adore! Magnifique! Cela me rappelle ma jeunesse, lorsque j’étudiais Corneille. Je recherchais depuis longtemps ce poème, je n’avais plus de référence à par une phrase célèbre.

  20. duran alain

    dit :

    Ce poème est une évidence : rien n’est plus beau que la jeunesse et la réponse du vieux n’est rien d’autre que le ralenti de son naufrage que le jeune subira bientôt. C’est merveilleusement bien écrit et survivra aux futurs et déjà vieux.

  21. Love ma langue française

    dit :

    Vous êtes hors sujet, surtout quand vous parlez de « machiste ». Cette phrase signifie juste que vu que c’est un écrivain connu s’il ne parle pas de sa beauté, ne serait-ce même que d’elle, elle finira oubliée au fil des âges à contrario de l’écrivain. Et c’est elle qui fronce le nez de la vieillesse de Corneille.. voilà rien à voir donc. On peut parler de vengeance mégalomane mais absolument pas de machisme ici. C’est dommage de s’exprimer sans prendre le temps de comprendre les choses, meme de s’y intéresser un tant soit peu, puisque le sens est limpide.

  22. warlix

    dit :

    Alors, pour répondre à angele, je ne suis pas certain que le propos

    « Vous ne passerez pour belle
    Qu’autant que je l’aurai dit. »

    soit machiste.

    Si la jeunesse porte avec elle la beauté plastique (parfois), est-ce que le « beau » chez l’autre y fait nécessairement référence ? Les canons de beauté évoluent à travers le temps, en est-il ainsi pour ceux de la tendresse, l’esprit, la douceur ? Je dirais que celui ou celle qu’on trouve belle ou beau peut ne pas l’être d’un point de vue esthétique ou plastique. Peut-on comparer un homme de vingt an à un de soixante ? Et pourtant, n’y a-t-il personne pour trouver beau ce dernier ?

  23. angele

    dit :

    C’est , certes, bien tourné. Mais affreusement machiste et fat: Vous ne passerez pour belle que quand je vous l’aurai dit. Alors que lui reste beau: J’ai quelques charmes qui restent éclatants.

    Les strophes expliquant que le temps fera passer certains traits et en révéler d’autres est très vrai.

    Cependant, il ne peut considérer que Marquise doit ignorer et ne pas jouir (de)sa jeunesse , je suppose qu’il a eu, lui, le bonheur d’en profiter… C’était vraiment un monde d’hommes et pour les hommes. Les femmes étaient vite considérées comme des enfants à éduquer…

  24. FOUCHER

    dit :

    Réponse à Roussel :
    Corneille avait 52 ans lorsqu’il a écrit ce poème à la jeune marquise de 25 ans. Pour la petite histoire, elle avait refusé la première fois ses avances ce qui expliquait peut-être son agressivité dans le poème.

  25. Roussel

    dit :

    Mon petit fils a étudié et appris ce poème. Il est en cinquième et nous avons abordé le thème de la beauté et de la jeunesse qui se fannent avec le temps. Pour compléter l’échange j’aimerais savoir à quel âge Corneille l’a écrit. Dans mon souvenir fort ancien il devait avoir 40 ans ? Merci de m’éclairer

  26. saltimbanque 47

    dit :

    Quel dommage que notre belle langue ne fasse plus l’admiration de la génération S. M. S. et verlan de tous les fans de N. T. M. !

  27. L’Arabe

    dit :

    Il se ramasse un rateau et il hurle… Ni voyez nulle grâce en dehors d’une jolie plume, et c’est ce que Brassens a mis en avant.

  28. paul

    dit :

    C’est la réponse de Marquise qui est cinglante et vraie en glorifiant le temps présent!

  29. lena raclin

    dit :

    Ce poème est magnifique mais je voudrais savoir si il rentre dans la case des poèmes sur la fuite du temps ou bien sur la méditation de l’existence

  30. susie auzat-magne

    dit :

    Petite poétesse n’a jamais lu notre merveilleux CORNEILLE, LE CID !!! C’est dramatique et non pas amoureux. merci à tous ces amoureux du beau « parler ». Tous les jours, je fredonne ce beau poéme « cornellien », il me remet les idées en place. Je suis, maintenant de l’autre coté du versant et je n’ai pas encore autant d’années à vivre. Et pour parler DU CID, je dirai ceci à « petite poétesse » je suis vieille, il est vrai, mais aux ames bien nées, la valeur ne s’éteint pas avec le nombre des années. S.A.M.

  31. susie auzat-magne

    dit :

    Toujours aussi fringant, notre beau CORNEILLE, et je suis toujours amoureuse de ce magnifique poeme

  32. MTL

    dit :

    Et toc, corneille, prends ca dans les dents.

  33. Coco84

    dit :

    j’ai appris ce poème quand j’étais collégienne, j’ai aujourd’hui 72 ans, je l’ai toujours trouvé si vrai !

  34. Frederic Tassigny

    dit :

    Brassens à mis en musique ce joli poème de corneille en n’en gardant que les 4 premières strophes mais en y ajoutant la derniere écrite par Tristan Bernard, en effet.. Il ne pouvait pas en être autrement venant de sa part !!! Il a d’ailleurs mis en musique beaucoup de poèmes, de Lamartine à Villon en passant par Pol… Et j’en oublie.. Merci Georges, grâce à toi, je peux dire en musique des choses sublimes à l’étonnement général la plupart du temps !!!

  35. Augustin

    dit :

    C’est beau

  36. nicolas

    dit :

    Bonjour, je suis élève de première et j’ai une anthologie sur le thème de la « mort/vieillesse » à rendre. Cependant je me pose une question à propos de ce texte : Est ce que Corneille présente la vieillesse comme une dégradation du corps et de l’esprit dans ce poème? Merci d’avance.

  37. Augustin

    dit :

    Magnifique poème

  38. Thomas Marie Claude

    dit :

    Je crois qu’il y a une autre réponse de Marquise….

    – C’est vrai à répondu Marquise,
    Je suis frivole assurément,
    Mais puisqu’il faut qu’on vous le dise
    Je n’ai que faire d’un vieil amant !

    … mais à ma grande honte, j’ignore quel en est l’auteur.
    Quelqu’un saura peut-être nous le dire. Merci.

  39. François

    dit :

    Ce ne sont pas Stances à la marquise mais Stances à Marquise. Marquise était Marquise-Thérèse Gorla, comédienne.

  40. Ouedraogo Mahamadi

    dit :

    Super !

  41. Rasade

    dit :

    La réponse de la marquise, écrite par Tristan Bernard et chantée par Brassens, vaut quand meme le détour…
    « Peut-être que je serai vieille
    Répond Marquise, cependant
    J’ai vingt-six ans mon vieux Corneille
    Et je t’emmerde en attendant »
    salut.

  42. fino

    dit :

    C’est vraiment fantastique!

  43. Lucie

    dit :

    C’est très beau ! Merci poetica de m’avoir fait découvrir ce poéme.

  44. anais

    dit :

    Est ce que ce magnifique poème a t’il été mis en musique par Brassens? Tout simplement magnifique et si vrai.

  45. petitepoetesse

    dit :

    C’est tiré du cid

  46. Benoît Pineau

    dit :

    ce poème est très beau. Je suis professeur de français en lycée et je trouverais très intéressant de le faire étudier à mes élèves. Merci poetica pour ce bon moment à lire ce magnifique poème.

  47. Fouillé

    dit :

    Je suis une adepte des poèmes depuis l’age de 13 ans,
    j’en ai 46 maintenant,
    le seul et le plus puissant ,
    celui qui envahissant ma vie ,
    n’a jamais quitté mon esprit ,
    il est lié à moi,
    à vie !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *