Hier, la chatt’ gris’ dans un p’quit coin
D’ nout’ guernier, su’ eun’ botte de foin,
Alle avait am’né troués p’quits chats ;
Coumm’ j’pouvais pas nourri’ tout ça,
J’ les ai pris d’eun’ pougné’ tertous
En leu-z-y attachant eun’ grouss’ piarre au cou.
Pis j’ m’ai mis en rout’ pour l’étang ;
Eun’ foués là, j’ les ai foutus d’dans ;
Ça a fait : ppllouff!… L’ieau a grouillé,
Et pis pus ren !… Ils ‘tin néyés…
Et j’sé r’parti, chantant coumm’ ça :
« C’est la pauv’ chatt’ gris’ qu’a pardu ses chats. «
En m’en allant, j’ai rencontré
Eun’ fill’ qu’était en train d’ pleurer,
Tout’ peineuse et toute en haillons,
Et qui portait deux baluchons.
L’un en main ! c’était queuqu’s habits ;
L’autr’, c’était son vent’e oùsqu’était son p’quit !
Et j’y ai dit : « Fill’, c’est pas tout ça ;
Quand t’auras ton drôl’ su’ les bras,
Coumment don’ qu’tu f’ras pour l’él’ver,
Toué qu’as seul’ment pas d’ quoué bouffer?
Et, quand mêm’ que tu l’élév’rais,
En t’ saignant des quat’ vein’s… et pis après ?
Enfant d’ peineuse, i’ s’rait peineux ;
Et quoiqu’i fasse i’ s’rait des ceux
Qui sont contribuab’s et soldats…
Et, – par la tête ou par les bras
ou par… n’importe ben par où ! –
I’ s’rait eun outil des ceux qu’a des sous.
Et p’t-êt qu’un jour, lassé d’ subi’
La vie et ses tristes fourbis,
I’ s’en irait se j’ter à l’ieau
Ou s’foutrait eun’ balle dans la pieau,
Ou dans un bois i’ s’accroch’trait
Ou dans un « cintiéme » i’ s’asphysquerait.
Pisqu’ tu peux l’empêcher d’ souffri,
Ton pequiot qu’est tout prêt à v’ni,
Fill’, pourquoué don’ qu’ tu n’ le f’rais pas ?
Tu voués : l’étang est à deux pas.
Eh ! bien, sitout qu’ ton p’quiot vienra,
Pauv’ fill’, envoueill’-le r’trouver mes p’tits chats !… «
Gaston Couté
C’est absolument sublime. La première fois que je l’ai entendu, ça m’a mis les larmes aux yeux.
Merveilleux Gaston Coûté. C’est triste et beau… violent comme la vie et l’amour… Ça fait au moins trente ans que je n’avais pas relu ce poème… et il me touche comme la première fois.
Je n’ai rien compris mais bon, ça doit être conceptuel
Gaston Couté est un poète de la Beauce (1880-1911). Il a beaucoup écrit ses oeuvres dans son patois.
Bonjour, seriez vous me dire de quelle forme poétique est ce poème svp ? Merci