Le vent tourbillonnant, qui rabat les volets,
Là-bas tord la forêt comme une chevelure.
Des troncs entrechoqués monte un puissant murmure
Pareil au bruit des mers, rouleuses de galets.
L’Automne qui descend les collines voilées
Fait, sous ses pas profonds, tressaillir notre coeur ;
Et voici que s’afflige avec plus de ferveur
Le tendre désespoir des roses envolées.
Le vol des guêpes d’or qui vibrait sans repos
S’est tu ; le pêne grince à la grille rouillée ;
La tonnelle grelotte et la terre est mouillée,
Et le linge blanc claque, éperdu, dans l’enclos.
Le jardin nu sourit comme une face aimée
Qui vous dit longuement adieu, quand la mort vient ;
Seul, le son d’une enclume ou l’aboiement d’un chien
Monte, mélancolique, à la vitre fermée.
Suscitant des pensers d’immortelle et de buis,
La cloche sonne, grave, au coeur de la paroisse ;
Et la lumière, avec un long frisson d’angoisse,
Ecoute au fond du ciel venir des longues nuits…
Les longues nuits demain remplaceront, lugubres,
Les limpides matins, les matins frais et fous,
Pleins de papillons blancs chavirant dans les choux
Et de voix sonnant clair dans les brises salubres.
Qu’importe, la maison, sans se plaindre de toi,
T’accueille avec son lierre et ses nids d’hirondelle,
Et, fêtant le retour du prodigue près d’elle,
Fait sortir la fumée à longs flots bleus du toit.
Lorsque la vie éclate et ruisselle et flamboie,
Ivre du vin trop fort de la terre, et laissant
Pendre ses cheveux lourds sur la coupe du sang,
L’âme impure est pareille à la fille de joie.
Mais les corbeaux au ciel s’assemblent par milliers,
Et déjà, reniant sa folie orageuse,
L’âme pousse un soupir joyeux de voyageuse
Qui retrouve, en rentrant, ses meubles familiers.
L’étendard de l’été pend noirci sur sa hampe.
Remonte dans ta chambre, accroche ton manteau ;
Et que ton rêve, ainsi qu’une rose dans l’eau,
S’entr’ouvre au doux soleil intime de la lampe.
Dans l’horloge pensive, au timbre avertisseur,
Mystérieusement bat le coeur du Silence.
La Solitude au seuil étend sa vigilance,
Et baise, en se penchant, ton front comme une soeur.
C’est le refuge élu, c’est la bonne demeure,
La cellule aux murs chauds, l’âtre au subtil loisir,
Où s’élabore, ainsi qu’un très rare élixir,
L’essence fine de la vie intérieure.
Là, tu peux déposer le masque et les fardeaux,
Loin de la foule et libre, enfin, des simagrées,
Afin que le parfum des choses préférées
Flotte, seul, pour ton coeur dans les plis des rideaux.
C’est la bonne saison, entre toutes féconde,
D’adorer tes vrais dieux, sans honte, à ta façon,
Et de descendre en toi jusqu’au divin frisson
De te découvrir jeune et vierge comme un monde !
Tout est calme ; le vent pleure au fond du couloir ;
Ton esprit a rompu ses chaînes imbéciles,
Et, nu, penché sur l’eau des heures immobiles,
Se mire au pur cristal de son propre miroir :
Et, près du feu qui meurt, ce sont des Grâces nues,
Des départs de vaisseaux haut voilés dans l’air vif,
L’âpre suc d’un baiser sensuel et pensif,
Et des soleils couchants sur des eaux inconnues…
Magny-les-Hameaux, octobre 1894.
Albert Samain, Le chariot d’or
Un vent frais brasse généreusement les immenses et lourdes branches qui bordent la Garonne. Et me voilà une fois de plus emmené par la main par le vent tourbillonnant qui rabat les volets. Quel bonheur d avoir associé ce poème au premier vent alentour. Merci à Monsieur Samain et à un instituteur.
Pour ne pas l’avoir appris j’ai du copier cent fois je dois apprendre mes leçons, mais je ne regrette en rien car quand je suis nostalgique et particulièrement en automne. Je me rappelle en partie les quatre première strophes de cette magnifique poésie qui me rappelle mon enfance passé. Cordialement Merci.
À l’attention de « Daly ». Vous avez écrit : « l’orthographe… Savez vous que celle ci aux cours des siècles a changée ». Moi, je n’aurais pas mis changé au féminin, mais seulement : « changé » Et quand vous écrivez : « bien sur », j’aurais plutôt écrit : « bien sûr », bien sûr…
Je crois que mon professeur de français n’appréciait pas ce poème, mais je ne saurais jamais pourquoi. C’était en 1964, j’étais en 3ème et le voyant imprimé sur le Lagarde & Michard qu’il était en train de feuilleter, il a dit d’un ton un peu courroucé, quelque chose comme : « … Des troncs entrechoqués monte un puissant murmure… Pfff ! » Peut-être trouvait-il cette expression un peu exagérée, voire ridicule ? Cela m’a suffisamment marqué pour que je m’en souvienne encore, 59 ans plus tard.
j ai appris ce poeme il y a 65 ans, a l ecole primaire.
Un bel usage des alliterations. C’est cela qui m’avait déjà marqué il y a 55 ans environ. Oh merde cela ne me rajeunit pas. Une belle langue il est vrai.
Appris dans les annees 50 a Aix-en-Provence ; Que de beaux sentiments d’une belle education au plus jeune age.
Bonjour amis amateurs de belles poésies,
J’ai découvert ce texte il y a peu d’années – j’avais 60 ans, c’était après la mort de mon père – à travers ce texte où les métaphores ciselées dans le quotidien ont un pouvoir d’évocation particulèrement puissant j’ai ressenti tout du long un souffle d’esprit très prégnant – Longtemps après les images restent collées dans votre crâne – Ce fut pour moi une découverte et je regrette fort qu’on ne me l’ait pas proposé au collège ou au lycée pour illustrer ce qu’est l’esprit – aujourd’hui , je me suis mise à l’apprendre mais il n’est pas facile à retenir à cause parfois de l’absence de transition, et j’ai sélectionné certaines strophes seulement car la totale longueur me gâcherait le plaisir – que l’auteur me pardonne –
Cher Monsieur Daly
Merci de penser à nos jeunes générations, tout au moins à celles qui prennent le temps de lire des poésies et apprennent ainsi à manier notre belle langue française. Elles attendent tant, par exemple, que des professeurs de lettres relisent leurs commentaires, modifient les accords de participes passés, leurs ponctuations inappropriées ainsi que les oublis d’accents circonflexes qui font douter du mot employé. Parfois, les pages du Bescherelle se collent si l’on ne l’ouvre pas souvent.
Elles vous en remercient.
Monsieur Micromegas dans votre envolée lyrique que vous justifierez je n’en doute point expliquez nous donc la règle la plus artificielle de notre langue : celle du participe passé avec le complément d’objet antéposé… Le Bescherelle de la conjugaison est en accord avec moi et je le consulte quelques fois… Moi je constate qu’il y a l’orthographe, mais aussi l expression. Donc on peut faire des fautes mais véhiculer des idées… Vous me direz à juste titre que l’on peut véhiculer des idées et des émotions sur un poème sans faire de fautes. Bien sur et vous allez nous le démontrer… Car on peut aussi se plaindre de l’orthographe et ne véhiculer que des gémissements…
Pour ma part je trouve les commentaires très touchants… Bien que prof de lettres je ne suis pas ici pour corriger des fautes…
Pour ceux qui critiquent l’orthographe… Savez vous que celle ci aux cours des siècles a changée… A l’arrivée de l’imprimerie par exemple les travailleurs étaient payés aux lettres… Pour gagner un peu plus ils ont enlevés les S… et mis sur un même tampon… le S surmonté d’un accent que l’on dit « grave »… Exemple : Forest est devenu Forêt… Le S on le retrouve dans… Forestier… Tout cela pour signifier que tout est relatif et que la pensée est aussi importante que l orthographe…
De plus qui connait exactement les règles d’accord du participe passé employé avec avoir… De l’emploi du participe passé et de l’infinitif… Quelle est la raison d’employer des doubles lettres… L’orthographe a changée aux cours des siècles…L’important est de se comprendre… Le saviez vous la règle du participe passé a été introduite par le poète Clément Marot qui l’a formulée en… 1538 en prenant exemple sur la langue italienne… Qui a depuis partiellement renoncée à cette règle… La tolérance d’accord fut refusée par l’académie… Donc la règle du participe passé employé avec l’auxiliaire avoir est le fait d’un poète…
Tout ceci pour dire que l’orthographe c’est bien… Mais l’expression c’est aussi bien… Aux chercheurs de fautes je leur ferai bien une petite dictée avec une abondance d’accords…
MAIS PLACE A LA POÉSIE…
Je suis heureuse de retrouver ce beau poème: l’automne. Je l’ai appris à l’école primaire de Balbiac, un petit village de l’Ardèche. Je me rappelais presque entièrement des 3 premiers paragraphes que je me récite de temps en temps. Je pense que notre maitresse nous avait fait apprendre que 5 ou 6 paragraphes car je constate aujourd’hui que ce poème était très long.
J’ai appris ce poème à l’école élémentaire de La Fère. Je me suis toujours souvenu que quelques mots m’avaient singulièrement frappé, me sensibilisant ainsi pour la première fois à la « poésie » :
« Le vent … … / … {tord} la forêt [comme une {chevelure}]. »
Superbe poème au fort pouvoir d’évocation. Dans ce domaine, je ne vois au dessus que « la mémoire et la mer » de Léo Ferré.
Ce poème me replonge dans l’atmosphère de mon école et décrit oh combien l’ambiance de l’automne exactement comme je la vivais. Beau poème, ambiance triste. La poésie nous pénètre par sa musique, comme toute musique. Il y a de très touchantes poésies en rap, en allemand, dans toutes les langues du monde. Les enfants d’aujourd’hui entendent d’autres poésies à travers les musiques qu’ils écoutent – et ils en écoutent beaucoup. Ils aiment leurs musiques, ils sont créatifs.
J’ai un peu peiné pour apprendre ce poème (je devais avoir une dizaine d’anées) mais chaque jour de grand vent, il me vient naturellement en mémoire,et je ne peux me retenir de de dire à haute voix. Il est absolument sublime. Dommage que nos enfants et petits-enfants n’aient plus cela dans leur programme…
Magnifique poème que j’ai appris (en partie) à l’école Mers-Sultan de Casablanca dans les années 50…(ou à l’Institution de La Salle ?). Les deux premières strophes me reviennent souvent en mémoire… souvenirs d’une lointaine enfance au Maroc…
Enfin un lecteur qui ose s’indigner des fautes d’orthographe monumentales qui jalonnent les commentaires; Ouf! merci. ce poème là me correspond moins, question de rythme…
Sublime…
Ce poème me rappelle mon enfance en Kabylie. Je l’ai appris à l’école primaire dans les années 50 et m’en souviens encore. J’en récite quelques vers quand l’inspiration me vient, au grand dam de mes enfants qui me disent que je suis un peu « gaga ». C’est vrai qu’eux, ne connaissent aucun poème, les programmes scolaires n’étant plus les mêmes depuis. La beauté de la langue Française se décline dans ses poèmes. Merci à mon instituteur.
Souvenir des années soixante à st Barnabé, Marseille.
Magnifique
Un poème appris dans les années 50 à l’école primaire de La Croix de Marlet. L’institutrice était ma mère. Et je lui redis encore merci de nous avoir fait partager de si beaux textes qui me laissent encore beaucoup de tendre nostalgie.
Nous sommes nombreux à faire des fautes d’orthographe et de syntaxe, soit par étourderie, par non relecture. D’autres par insuffisance d’études. Mon immense professeur de mathématique faisait des fautes par kilo. L’important c’est d’exprimer ce que l’on ressent. Rassurez-vous tous les français ne sont pas dans un tel état de délabrement orthographique. Un peu de discernement et d’indulgence chez le lecteur. Se garder de trancher à vif. Il n’est pas interdit de temps à autres de corriger avec art et manière. Corriger moi s’il vous plaît mais lisez moi. Merci.
Bonjour, vous voulez dire « ne savent plus » ou alors ce n’est pas bien français.
Bonjour, je n’en reviens pas, chaque jour, de constater les fautes d’orthographe commises partout, y compris ici dans de simples commentaires sur un poème !… A croire que, vraiment, la plupart des Français se savent plus s’exprimer dans leur langue maternelle, fût-ce même dans le langage courant. Désolant.
Absolument magnifique.
Ceux qui aime ce poème, je les comprend, car il est génial !!
c’est un beau poème mais il est un peu long !!
Trop cool votre poème je le connais par coeur
C’est ma saison préférée, votre poème me fait aimer davantage cette saison. Il ne faudrait pas oublier les mordorés , les oranges, les rouges des feuilles de nos forêts québécoises. Merci pour votre sensibilité aux saisons.