S’il devait venir ce serait une nuit extraordinaire
Les touffes d’étoiles brillaient avec des racines d’or
Quand il me montra du doigt la constellation d’Orion
Je reconnus le professeur d’espérance que j’attendais
La jeunesse c’est la passion de l’inutile nous dit-il
Et il ensemença de pervenche les champs et les cœurs
Si nous savions vivre conscients nous ne serions malades
De ce trop de sang amer au lieu du sang de miel doux
Il ramena un cerf qui courait libre parmi nous
Et des biches aux cils pleurant de manque d’amour
Dans la tendresse des herbes et l’humus des forêts
Parce qu’il voulait que la joie demeure pour tous
Il fit sourdre aux corps des tambours de danse
Comme la cadence forte du sang dans les artères
Et l’on sentit la joie aussi inépuisable que l’air
Réveillant en nous le trop grand appétit de vivre
Une bergère seule savait sans vraiment savoir
Elle portait en elle la joie des gestes naturels
Ne parlait pas la langue menteuse des hommes
Mais en initiée celle des agneaux et des oiseaux
Chacun ne peut atteindre que la joie qu’il comprend
Les passions humaines ont encore les batailles au cœur
Et la violence toujours engendre la mort et le malheur
Alors qu’il faudrait que la joie fût tranquille et paisible
Alors lucidement désespéré il avança dans l’orage
La foudre lui planta un arbre d’or dans les épaules
Et il éclata dans la nuit comme une étoile perdue
Je l’attendrais pour revivre espérant son retour.
Jacques Viallebesset, Extrait de Sous l’étoile de Giono. Copyright Editions Alain Gorius/Al Manar