Vieillir, se l’avouer à soi-même et le dire,
Tout haut, non pas pour voir protester les amis,
Mais pour y conformer ses goûts et s’interdire
Ce que la veille encore on se croyait permis.
Avec sincérité, dès que l’aube se lève,
Se bien persuader qu’on est plus vieux d’un jour.
À chaque cheveu blanc se séparer d’un rêve
Et lui dire tout bas un adieu sans retour.
Aux appétits grossiers, imposer d’âpres jeûnes,
Et nourrir son esprit d’un solide savoir ;
Devenir bon, devenir doux, aimer les jeunes
Comme on aima les fleurs, comme on aima l’espoir.
Se résigner à vivre un peu sur le rivage,
Tandis qu’ils vogueront sur les flots hasardeux,
Craindre d’être importun, sans devenir sauvage,
Se laisser ignorer tout en restant près d’eux.
Vaquer sans bruit aux soins que tout départ réclame,
Prier et faire un peu de bien autour de soi,
Sans négliger son corps, parer surtout son âme,
Chauffant l’un aux tisons, l’autre à l’antique foi,
Puis un jour s’en aller, sans trop causer d’alarmes,
Discrètement mourir, un peu comme on s’endort,
Pour que les tout petits ne versent pas de larmes
Et qu’ils ne sachent pas ce que c’est que la mort.
François Fabié, Ronces et lierres
Poème découvert par hasard sur un magnifique papier parchemin fleuri. Je l’ai acheté et gardé précieusement. Il retrace le parcours de mon papa qui nous a quitté au début du mois. Et ce n’est pas sans émotions que j’ai tenu à le lire en fin de cérémonie. La fin différente : « puis un beau soir, discrètement, souffler la flamme de sa lampe et mourir parce que c’est la loi. » Est tellement fidèle à notre vécu. Il est parti à 21h dans son sommeil.
Je lis ce poème… je ferme les yeux… je respire doucement… je m’approche inexorablement de cette réalité qui sera mienne ! Merveilleux texte
Merci Joël André pour la superbe interprétation.
Les mots que j attendais pour exprimer ce que je vis à l’Aube de mes 80 ! Je vais m’en nourrir… et rajouter : se confier à ce que certains nomment le hasard…
J’ai la version « adoucie » de ce très beau poème que je m’apprête à poser sur le mur. Je le lisais déjà au hasard de mes feuilletages depuis de nombreuses années l’ayant acheté au Moulin de Brousses (Aude). A la veille de mes 73 ans toute ma vie semble écrite à travers ces jolis vers. Je les relirai plus facilement, en passant devant…
J’ai également sous les yeux sur parchemin une fin différente de ce magnifique poème : après « l’antique Foi » : « Puis un beau soir, discrètement, souffler la flamme de sa lampe et mourir parce que c’est la loi ». Je préfère cette fin car je trouve l’emploi du mot « mort » inadéquate dans ce poème magnifique qui me conforte dans mon amour de la poésie.
C’est émouvant et sublime
Magnifique
Je connais une fin différente de ce magnifique poème : après « l’antique Foi » : « Puis un beau soir, discrètement, souffler la flamme de sa lampe et mourir parce que c’est la loi ». J’avoue préférer cette fin.
Sublime on devrait apprendre ça dans toutes les écoles. Ca changerait les mentalités.
J’ai mis ce poème en musique et je vous invite à m’écouter sur you tube en demandant Joel Andre, Savoir vieillir.
Je viens de trouver sur une brocante une litho de savoir vieillir de F.Fabié que je ne connaissais pas… pour des raisons que j’ignore j’ai lu la 1ère ligne et oupsss, je l’ai acheté sans même savoir le prix… électrochoc humain… en plus il à été imprimé a la main sur papier à la cuve aux Moulin du Pen Mur Muzillac (Morbihan). Qui peut me renseigner…?
Bonjour,
J’ai calligraphié et encadré ce poème pour mes parents qui voulaient l’avoir en permanence sous les yeux tant il leur semblait conforme à l’idée qu’ils se faisaient de leur vieillesse. Maintenant, j’ai soixante dix ans, j’ai récupéré ce cadre et l’ai exposé chez moi pour nous rappeler, à mon épouse et à moi, comment bien vieillir.
Oui je le connais depuis plus de 30 ans et à 80 maintenant je le relis sans trop d’émotions mais cependant avec étonnement car la version que j’ai connue dans les 4 derniers vers était différente et me rappelait les dernières lignes d’un très beau livre de P.Henri SIMON « Les Hommes ne veulent pas mourir ». J’aimerais retrouver cette version.
Pierre V. (13.01.2019)
Bouleversant ! J’ai 88ans et j’en pleure c’est tellement vrai.
A mettre en regard du texte de Mc Arthur « Etre jeune » et s’en faire une philosophie de l’existence qui nous reste.
Je trouve ce poème magnifique ! J’ai 90 ans et je suis totalement concernée et d’accord.
Plus on vieillit, plus ce poème devient une règle de conduite qu’on devrait adopter. Superbe!
Je connaissais ce poème depuis longtemps, mais je ne savais pas encore qu’un jour, je le lirais à nouveau, pour moi…
Tel est notre destin. Mais on a quelques années pour s’habituer …..
Sublime et bouleversant