Madame de la Tour dans votre château
Vous êtes si belle et vous semblez triste
Vous versez des pleurs dans de la batiste
Vous versez des pleurs dans de la batiste
Vous êtes sans amour
Madame de la Tour
Dans votre château
Vous craignez la nuit, Madame de la Tour
Dans votre château vous craignez la nuit
Car dans les couloirs tournent les esprits
Car dans les couloirs tournent les esprits
Qui ont leur caveau
Non loin de la tour
De votre château
Et vous n’aimez point votre époux hobereau
Qui est à l’image de tous ces tableaux
Cadres de dorure suspendus aux murs
Cadres de dorure suspendus aux murs
Visages de peinture
A la bouche dure
Qui vous jugent sans mot
Et vous détestez, Madame de la Tour
Tous les bibelots époussetés chaque jour
Que vous rencontrez de salons en bureau
Que vous rencontrez de salons en bureau
Traînant vos oripeaux
Et observant le jour
A travers vos carreaux
Et vous pleurez au lit, Madame de la Tour
Couchée dans la soie et dans la broderie
Près de votre mari qui rêve de gras perdreaux
Près de votre mari qui rêve de gras perdreaux
Vous rêvez aussi
Au valet joli
Qui panse vos chevaux
« Je le voudrais à moi, ce valet si beau
Je rêve de lui et d’odeurs d’écurie
De ses yeux qui me narguent et de sa bouche qui rit
De ses yeux qui me narguent et de sa bouche qui rit
D’un corps épanoui
De bonheur et de foin
Loin de mon châtelain ! »
Haha Hoho
Madame de la Tour dans votre château
Vous êtes si belle et vous semblez triste
Vous versez des pleurs dans de la batiste
Vous versez des pleurs dans de la batiste
Vous êtes sans amour
Madame de la Tour
Dans votre château.
Esther Granek, Portraits et chansons sans retouches, 1976