Assemblée choisie.
Au frais, le champagne.
Et déjà me gagne
un vent d’euphorie…
Se forment les groupes.
Brouhaha. Parlotes.
Et, le vent en poupe,
s’agitent les glottes.
On me décore…
*
Mais bientôt, silence !
De bémols en dièses
les discours commencent.
Ça me comble d’aise…
Comme auréolée,
nimbée d’une aura,
dans ce nirvana
j’entre de plain-pied.
On me décore…
*
Ah ! l’instant heureux !
En bavant, je broute.
Parfois je fais « Mmeeuuh »
De moi, je ne doute.
Voyez ça ! J’apprends
(plaisir infini)
que de maints talents
suis pourvue, farcie.
On me décore…
*
Nul ne se tient quitte.
Et, le rose aux joues,
suis dans le mérite
plongée jusqu’au cou.
Et nul ne s’étonne.
Et moi, moins qu’autrui.
D’ailleurs je rayonne.
Je prends. Et m’emplis.
On me décore…
*
En grand naturel,
comme allant de soi,
je découvre en moi
l’être exceptionnel.
…………………………….
Ah ! On me décore !
Terminée, la fête.
Et fini, le bal.
Et chacun s’apprête
à mettre les voiles.
L’essaim se dilue.
Narquois, le troupeau.
Et lourd, le rideau
me tombant dessus…
Esther Granek, De la pensée au mots, 1997
Des lumières de la Gloire, au retour à l’obscurité, à la réalité quotidienne… éphémère moment… Concis et précis, j’aime…