Mes yeux sont éblouis du jour que je revois !
L’ayant cru défier pour la dernière fois.
Mes yeux sont étonnés de revoir cette aurore,
Ainsi, moi qui souffris autant, je vis encore !
Je vis encor, je souffre et peux encor souffrir…
Sans exhaler mon cœur dans un dernier soupir !
Mais comment puis-je ainsi voir la lumière en face,
Moi dont le cœur est lourd et dont l’âme est si lasse ?
Ô mon destin mauvais… Je suis devant l’amour
Un adversaire nu… Voici venir le jour !…
Moi dont l’être est plus las que le dernier automne
Qui se meurt sur les lacs, je vis… Et je m’étonne !
Renée Vivien, Dans un coin de violettes, 1910