La nuit, dans le silence en noir de nos demeures,
Béquilles et bâtons, qui se cognent, là-bas ;
Montant et dévalant les escaliers des heures,
Les horloges, avec leurs pas ;
Émaux naïfs derrière un verre, emblèmes
Et fleurs d’antan, chiffres et camaïeux,
Lunes des corridors vides et blêmes
Les horloges, avec leurs yeux ;
Sons morts, notes de plomb, marteaux et limes,
Boutique en bois de mots sournois
Et le babil des secondes minimes,
Les horloges, avec leurs voix ;
Gaînes de chêne et bornes d’ombre,
Cercueils scellés dans le mur froid,
Vieux os du temps que grignotte le nombre,
Les horloges et leur effroi ;
Les horloges
Volontaires et vigilantes,
Pareilles aux vieilles servantes
Boitant de leurs sabots ou glissant sur leurs bas,
Les horloges que j’interroge
Serrent ma peur en leur compas.
Emile Verhaeren, Poèmes, Société du Mercure de France, 1895
De la vraie poésie avec une force évocatrice en peu de mots, que j’opposerais aux interminables phrases rimées ou rimantes ; mais à ma connaissance, ce n’est pas « chiffres et camaïeux » mais chiffres « maigres et vieux »….
Poésie apprise au collège… que de souvenirs….
Très bon poème. Miame miame
Relevez les adjectifs qualificatifs
Magnifique poème très imagé. Je vais l’apprendre. Je redécouvre Verhaeren, disparu depuis les poèmes appris à l’école. Il est de la trempe de Rimbaud, Baudelaire, Verlaine…