À Paul Verlaine.
Sur un fond d’or pâli, les saints rouges et bleus
Qu’un plomb noir délimite en dessins anguleux,
Croisant les bras, levant au ciel un œil étrange :
Marc, brun, près du lion ; Mathieu, roux, près de l’ange
Et Jean, tout rose, avec l’oiseau des empereurs ;
Luc, et son bœuf, qui fait songer aux laboureurs
Dont le Messie aux Juifs parle en ses paraboles :
Tous désignant d’un doigt rigide les symboles
Écrits sur un feuillet à demi déroulé ;
Notre Dame la Vierge, au front immaculé,
Présentant sur ses bras Jésus, le divin Maître,
Qui lève ses deux doigts pour bénir, comme un prêtre ;
Le bon Dieu, blanc vieillard qu’entourent les élus
Inclinés sous le vol des Chérubins joufflus ;
Et le Christ, abreuvé de fiel et de vinaigre,
Cambrant sur le bois noir son torse jaune et maigre.
François Coppée, Poèmes divers, 1869