« je vais sur le balcon et mes doigts glissent
sur la peau tendue de la nuit »
Forough Farrokhzad
Nous nous aimons depuis plus de sept mille et une nuits
et le temps a changé mon corps, mais tu es là,
je prends ta main comme ce jour
il y a plus de sept mille jours.
Nous nous aimons, et la vie a changé nos rêves
mais tu es là, et tu me dis : « on fait
ce que tu veux », et je dis : « non,
ce que tu veux »
ne sais jamais vraiment ce que tu veux.
Nous nous aimons ; du bois de chênes, je connais chaque arbre
et de la dune, chaque creux
jamais n’ai su
ce que voyais fermant les yeux
Nous nous aimons, je ne sais pas ce que pour toi veut dire,
est-ce juste sentir le temps couler
ou bien le retour des oiseaux,
en novembre, venant de Sibérie ? alors,
sur la plage de sable fin,
je m’agenouille dans l’alignement de l’église
et j’écris sur le sable, en italien :
Ti Amo
sous les lettres de ton prénom
il y a plus de sept mille jours,
j’apprenais à lire une à une
chaque lettre de ton prénom.
Nous nous aimons.
Revenu le temps de la nuit,
le temps où l’océan se brise, où l’on est bien ; sur la vitre, bat la tempête,
je te regarde. « On fait quoi ? »
« Ce que tu veux »
et je dis : « non ; ce que tu veux », nous connaissant
depuis sept mille et une nuits.
Villebramar, 2019