Assez vu. La vision s’est rencontrée à tous les airs.
Assez eu. Rumeurs des villes, le soir, et au soleil, et toujours.
Assez connu. Les arrêts de la vie. – Ô Rumeurs et Visions !
Départ dans l’affection et le bruit neufs !
Arthur Rimbaud, Illuminations
Du nouveau du nouveau du neuf !
Ce très court poème des « Illuminations » pourrait être rattaché à la thématique désabusée de la « Saison en enfer », à « Adieu » notamment, ou plus loin dans les « Illuminations » à « Solde » qui semble être une réécriture de « Départ » sous une forme plus développée.
Bâti sur une anaphore (figure de style chère à Rimbaud qui permet d’énumérer des sensations ou des pensées au premier degré, avec force, en évitant l’analyse), ce « assez » répété trois fois semble annoncer un « départ » sans retour possible.
Rimbaud a fait le tour de la question, sans appel, sur le plan des « sens » (« Assez vu »), de la présence (« Assez eu ») et de la science (« Assez connu »), avec une assonance en « u » qui rythme le propos et le ferme dès l’attaque de la ligne : la saturation est totale, le dégoût affiché et définitif… avant de lâcher cette phrase finale lumineuse, comme un lâcher de colombes dans un ciel d’orage (un « envoi », dirait-on si joliment pour une Ballade), d’un élan fulgurant et proprement libérateur dont toute la poésie rimbaldienne est émaillée comme autant de pépites qui brilleront longtemps au-delà du ciel même de la Poésie : « Départ dans l’affection et le bruit neufs ! ».
Les phrases sont nominales (sauf la deuxième), les liens logiques de coordination absents (parataxe) : le poète est de toute évidence très pressé de « partir », assez de temps perdu dans les « Visions » épuisantes et les « Rumeurs » bruyantes et trompeuses…
L’ « affection (neuve) », c’est bien entendu l’amour réinventé, et le « bruit neuf », la « nouvelle harmonie » dont il est question deux poèmes plus loin, dans : « A une raison ».
Ce « Départ » qui nous amène sans cesse sur de fausses routes, ponctué de retours répétés et agacés pour Rimbaud comme pour nous tous (« On ne part pas », dit Rimbaud dans la « Saison »), témoigne de la difficulté à trouver sa voie vers la vraie Vie qui ne peut être que le réel enfin dé-couvert, re-trouvé, loin des cieux artificiels de la cité et des flonflons de la fête qui nous laissent toujours infiniment tristes et seuls quand les lampions s’éteignent…
Ne nous y trompons pas : Rimbaud toute sa vie -lui auquel le Surréalisme aura voulu se rattacher dans ses images délirantes, son imagination créatrice, son écriture automatique- n’aura été qu’un chercheur de « réel », désespérément : il n’invente pas, il part de la « chose », dans la Voyance, dans l’Alchimie du verbe, dans les refrains naïfs d’une poésie hors du temps, dans ce retour à la première sensation recréée par l’écriture poétique inlassablement, notamment dans les « Illuminations », car dire le réel ne peut passer que par sa recréation art-ificielle, et le réel ne peut être retrouvé qu’en le quittant d’abord, en cherchant (suprême Science), en inventant les outils, les techniques lexicales, syntaxiques, rhétoriques qui peuvent le traduire, le trahir, le faire surgir dans son indicible présence : alors seulement on pourra comprendre, ressentir et ré-actualiser par la magie de l’écriture ce qu’est « la mer allée avec le soleil » ! L’ « inconnu » ne peut être que du connu revu aux rayons d’un soleil neuf…
Mais aucune de ces solutions poétiques n’aura pu satisfaire Rimbaud, on l’a vu, lui dont l’appétit de réel était insatiable, non pas le réel au sens très étroit où l’entend le « réalisme », mais au sens dérivé du « réelisme » dont parle Jean-Marie Gleize, d’un réel qui ne peut être que rationnel pour paraphraser Hegel, cependant la Raison suprême ici, poétiquement parlant, ne peut être que l’Amour, « l’affection (neuve) » évoquée dans « Départ », « le nouvel amour » de « A une raison », « l’amour, mesure parfaite et réinventée, raison merveilleuse et imprévue » de « Génie ».
Au fond Rimbaud n’a pas « quitté la poésie », comme on le répète à l’envi, car la poésie n’a jamais été le problème pour lui contrairement à Verlaine (sauf peut-être au tout début, dans un souci adolescent vite dépassé et déçu de gloire littéraire, dès 1872), et son départ en Arabie ne peut être sérieusement interprété que comme la continuation de la Poésie (au seul vrai sens du terme où nous l’entendons ici : i.e. la recherche de réel) sous une autre forme…
Je ne suis pas d’accord avec tous ces professeurs qui tentent de comprendre ce poème en le compliquant beaucoup trop. Rimbaud était ce qu’on pourrait appeler un traîne savates, et il buvait et se défonçait (le guai venin des liserons, renseignez vous); Sa poésie à cette époque de sa vie se base sur les sensations, rien de plus! Il en a marre d’être là où il est, il s’ennuie et veut bouger, c’est aussi bête que ça !
Très beau poème. Je le conseille pour une anthologie.
Chacun(e) voit et comprend tout à sa manière, d’où il, ou elle se situe et à partir de ce qu’elle, ou il croit ou reconnaît.
La puissance concentrée de ce poème offe à l’âme de contempler un témoignage de sa propre maturité. L’extrême économie des concepts évoque le détachement du connu comme étant la renaissance à l’amour de ce qui advient.
« Assez vu. La vision s’est rencontrée à tous les airs. »
Comme le sommet voit toutes les voies qui viennent à lui, la conscience qui se connait comme source de la vision, l’a vécue sous tous ces angles, car elle la voit naître et s’évanouir. Elle se sait avant et au delà des airs, des apparences. Car chacune d’entre elles n’est qu’un parmi l’infinité de ses propres reflets.
« Assez eu. Rumeurs des villes, le soir, et au soleil, et toujours. »
Se sachant aussi avant et au-delà de tout avoir ou possession, laissant derrière elle le bruit quotidien des avidités mondaines que la nuit engloutit, la conscience se vit elle comme lumière de la lumière elle-même, éternelle.
« Assez connu. Les arrêts de la vie. – Ô Rumeurs et Visions ! »
Alors, même la connaissance tant convoitée est perçue dans sa nature transitoire et parcellaire, faite d’arrêts sur images. Elle est perçue comme composée d’échos mémoriels, d’anticipations et d’intuitions.
« Départ dans l’affection et le bruit neufs ! »
Et, d’instant en instant, elle accepte de tout quitter, devenant alors accueil nu, amour de ce qui naît.
C’est fou parce que c’est si court et pourtant si beau, en quelques lignes, Rimbaud exprime tellement de choses et d’émotions…
Je ne comprends pas tout le sens du poème. Pourriez-vous m’aider?
Tellement beau ❤️
1873-1875 : date de parution du poème.
Date de parution : 1872-1875 pour ceux qui demandent
C’est quoi la date svp
C’est magnifique
Savez-vous quel valeur a le voyage dans ce poème?
Assez vu.
-Rimbaud s’est consacré a devenir un Voyant
La vision s’est rencontrée à tous les airs.
-ce qu il a ramené de ses visions cela n’a pas été pris au sérieux pour améliorer le sort des hommes mais est devenu chanson et divertissement
-dans les airs vivent les esprits et les idées la vision en a fait le tour
-il ne peut distinguer la Vision de la vision des choses et personnes qui l’entourent, aussi de chaque côté qu il regarde ils ne voit que des recommencements
Assez eu.
la vie consiste en deux choses se préparer à être et se préparer a avoir
après avoir traité des choses subtiles de la vision et de l’air
il parlera du matériel
Rumeurs des villes,
la ville est une machine qui isole l homme de son milieu naturel pour lui fournir un milieu artificiel
la ville est aussi liée au langage et en particulier a la présence de plusieurs flux de langages qui ne servent pas le sens mais juste un son lointain
le soir,
le soir et la nuit lieu de secret de découverte, d’expérience, de trouble
et au soleil,
il y a la part de dyonisos et il y a la part d’apollon
envisagée ici comme une maturité
et toujours.
suggère la permanence
mais aussi la boucle la rechute
Assez connu.
le savoir
Les arrêts de la vie.
les livres
Ô Rumeurs et Visions !
le flot de ce que les gens disent
et le flot de ce que l on voit
Départ dans l’affection et le bruit neufs !
être vivant c est sentir
sentir c est être affecté et sinon créer du sens au moins créer du bruit
c est une formule magique visant a casser les murs de melancholie et d espoir qu il vient d’ériger autour de lui
A Lola qui dit (le 10 avril 2017 à 12:59) : ‘je ne comprends pas ce poème’. Tout d’abord, je pense que la communication écrite ET orale sont complémentaires pour un poème. Donc, il faut le dire. L’entendre lire par qq d’autre. Ensuite je peux tenter quelques bribes d’explications, mais jamais cela ne fera le tour de la question : car ce poème n’est pas ‘joli’ ou ‘beau’, il est tout bonnement génial. ( Mot que je vais ensuite tenter de définir, comme il définit ce poème je pense!) Et ce faisant, il est inaccessible de A à Z. Ou plus exactement son sens non seulement sera perçu partiellement par notre subjectivité mêlée à notre intelligence sensible , mais pour le dire en élargissant le cadre, même l’ensemble des lecteurs associé ne pourrait parvenir à ‘faire comprendre’. C’est à chacun de s’y coller. Et tant mieux si ‘départ’ garde sa part de mystère. Le monde ne se sépare pas entre ceux qui expliquent, et puis ceux qui réussissent à comprendre grâce aux premiers…. Je tente une approche tout de même…
N’y a-t-il pas un immense poème de Rimbaud, antérieur, qui est long comme un fleuve.
Et ici, il est bref comme quoi? …
ET puis ce mot ‘Assez’ que veut-il dire ? Notez que c’est un des derniers poèmes de Rimbaud et qu’il est tout jeune… Il décide d’arrêter. Et de fiche le camp.
ET ‘Ô Rumeurs et Visions’ ça ne vous rappelle pas un autre poème? Pourquoi cette imploration associée aux arrêts de la vie?
Et l’affection, ça veut dire quoi?
ET ‘vu eu connu’ ça résume quoi?
En général les mots, puisque fatalement ils se succèdent, séparent les moments, les corps, les pensées.
Tout le génie de Rimbaud consiste entre autres à condenser les mots de telle sort qu’ils unifient sa pensée, sa vision, son départ.
Ici, on croirait qu’il fait trois tours sur lui-même avec ses pensées en un clin d’œil, propres à se donner de l’énergie : par 3 fois ‘Assez… puis ‘départ’ !
C’est rapide, un départ…
Bonjour, je ne comprends pas ce poème. Est-ce que quelqu’un aurait la gentillesse de me l’expliquer. Merci d’avance.
Je pari que la plupart d’entre vous savent pas de quoi ça parle mais vous voulez avoir l’air poetique et intellectuelle en faisant des remarques sur ce poeme.
Le poète est Arthur Rimbeaud né à Charleville le 20 octobre 1854 et mort à Marseille le 10 novembre 1891… ce poème est de 1873-1875…
Le poème est-il imaginaire ?
Très jolie, ça a de l’esthétique.
Il est peut être très court mais bon, je le trouve très joli!!!
De plus j’adore Arthur Rimbaud. Il fait de très beaux poèmes.
Ce poème est très joli…
Julie a raison, on sait que c’est Arthur Rimbaud qui l’a écrit, donc on sait également qu’il n’a pas été écrit dans les années 2000 pars exemple !Sinon ce poème est très beau et très bien écrit .
Ce poème est très beau mais il n’a pas de date, c’est dommage 🙂
Certes Teddy.A mais quand l’artiste nous est donner on peu deviner la date …
Ce poème est très beau mais il n’a pas de date, c’est dommage 🙂
C’est koi la date de parruption ?
date de parution???svp
Magnifique !
il est trop bien alors que je suis en train d’écrire mon florilège
j’en avais besoin pour faire un receuil mais je pense que c’est trop court :s
zut!! ces trop court pour les devoirs
C’est court pour un poème !!!
WWAAOUUHH Que c’est beau 🙂
@Estrolla, c’est de qui? Cest très beau, tout comme ce poème de Rimbaud
Oh que c’est beau…O_O
Départ
envie de laisser derrière cette entrave de vanité,
babioles, bibelots, breloques baroques,
robes, boucles brillantes brunes et bijoux en toc.
envie de dire « Je m’en vais combler ma vacuité »
Et de rencontrer des âmes,vivantes, et mortes.
Le vent qui soufflera dans mes jupons fera en sorte
que mes doigts se gèlent et que les derniers cheveux
tombent de ma veste et envoient un poétique aveu.
Je pars, aujourd’hui, me rencontrer, et quand
je le retrouverai, je serai un peu différente, pourtant
Je l’aimerai. Il sera là, son absence aura fait naître,
des billes de fer dans mon ventre, je restais à la fenêtre
parfois une heure, et j’imaginais ses mains, puis
je repartais et je rassemblais milles détails à lui écrire,
et toujours plus d’amour à lui offrir.
c’est très joli
trop bien 🙂