Je vous ai tant aimé, Silence…
Cher vieux Silence, reposant comme une eau plane.
Vous ne me paraissiez jamais immense,
Jamais inquiétant — mais diaphane
Et doux autour de moi, rempart secret,
Tour invisible et sûre… Bon Silence,
Où l’on respire à l’aise et qu’on dirait
Peuplé des mille choses que l’on pense
Quand on est seul, un jour très beau…
Silence d’une rose au bord de l’eau,
D’un lézard au soleil, d’un fauteuil près du feu,
Du cadre sertissant un paysage bleu,
Je vous ai tant aimé…
Au vain bruit des paroles,
Comment s’accoutumer ?
Comment suivre l’étourdissante farandole
De mots parfois trompeurs et discordants
À travers tant de voix, tant d’accents, tant de cris,
Quand on vous a chéri,
Silence ?… Ah ! laissez-moi vous retrouver, gardant
Ce bienfaisant pouvoir des demi-rêves
Dans le royaume où les Images vivent !
Qu’une musique, en écho, nous arrive
Quand le rideau se lève,
Si vous voulez…
Mais laissez-moi, comme avec un ami,
Voir avec vous l’histoire merveilleuse
Que devient à mon gré chaque film déroulé.
Nous referons, s’il faut, des fins heureuses…
Nous irons jusqu’au bout de ce qu’auront promis
La fée ou l’enchanteur aux baguettes de lune.
Ici, tous les jardins aux fruits d’or sont permis !
Nous nous évaderons des phrases importunes…
L’écran tourne pour nous ses pages, une à une —
Pour nous, Silence aux yeux songeurs, Silence ami…
Sabine Sicaud
C trop beau !
Quel talent. Je préfère garder le silence.