L’homme est seul, l’homme est faible. Il doit, pour se nourrir,
Asservissant le sol aux moissons réfractaire,
Diriger la charrue et cultiver la terre,
Sinon, le pain lui manque, et l’homme doit mourir.
Il ensemence un champ, et le blé salutaire
Germe dans les sillons qu’il commence à couvrir.
Mais le soleil ardent fane et fait se flétrir
Chaque épi mûrissant, qui se courbe et s’altère.
Ou la grêle s’abat et fauche la moisson ;
Ou la gelée arrive, et suspend un glaçon
A chaque grain de blé qui tremble au bout du chaume.
Tout est perdu, tout est anéanti. Mais l’homme,
S’il ne meurt de la faim, trouve la mort auprès
Des fauves monstrueux qui hantent les forêts.
Alfred Jarry, Ontogénie – Œuvres complètes, tome I (Gallimard, La Pléiade, 1972)