J’avais été cueillir des gerbes de lilas,
J’en faisais des bouquets presque devant ta porte,
Tout le beau jour vécu s’épanchait de mes bras,
Une ivresse sortait, lourde, poignante et forte
De ces lilas pesants qui respiraient tout bas.
Je chantais à mi-voix… me berçant de ce leurre
De la chanson jetée à travers le chagrin,
Les arômes fervents montaient vers ta demeure,
Et mon désir de toi que j’exhalais sans fin
Mettait un souffle d’or dans la tiédeur de l’heure.
Tes pas fermes et doux, tout à coup, s’annonçaient
Tu passas… Je me tus… L’âme, à tes pieds, fauchée
J’écoutai, les yeux clos, tes pas qui décroissaient,
Je te suivis de toute mon ardeur cachée…
Oh! ce silence et les lilas qui l’emplissaient !…
Hélène Picard, L’Instant Éternel, 1907