Cannibale, mais ingénue, elle est assise, toute nue, sur une peau de kanguroo, dans l’île de
Tamamourou!
Là, pétauristes, potourous, ornithorynques et wombats,
phascolomes prompts au combat,
près d’elle prennent leurs ébats!
Selon la mode
Papoua, sa mère, enfant, la tatoua: en jaune, en vert, en vermillon, en zinzolin, par millions
oiseaux, crapauds, serpents, lézards, fleurs polychromes et bizarres,
chauves-souris, monstres ailés, laids, violets, bariolés, sur son corps noir sont dessinés.
Sur ses fesses bariolées on écrivit en violet deux sonnets sibyllins rimes par le poète
Mallarmé et sur son ventre peint en bleu fantastique se mord la queue un amphisbène.
L’arête d’un poisson lui traverse le nez, de sa dextre aux doigts terminés par des ongles teints au henné, elle caresse un échidné, et parfois elle fait sonner en souriant d’un air amène
à son col souple un beau collier de dents humaines,
La belle
Négresse, la
Négresse blonde !
Or des
Pierrots, de blancs
Pierrots, de doux
Pierrots blancs comme des poiriers en fleurs,
comme la fleur des pâles nymphéas sur l’eau, comme l’écorce des bouleaux, comme le cygne, oiseau des eaux,
comme les os
d’un vieux squelette, blancs comme un blanc papier de riz, blancs comme un blanc
Mois-de-Marie, de doux
Pierrots, de blancs
Pierrots
dansent le falot boléro
la fanfoulla, la bamboula,
éperdument au son de la
maigre gusla,
autour de la
Négresse blonde.
Georges Fourest, La Négresse blonde, 1909
Quel régal ! Fourest c’est le plus fort…