France, mère des arts, des armes et des lois,
Tu m’as nourri longtemps du lait de ta mamelle :
Ores, comme un agneau qui sa nourrice appelle,
Je remplis de ton nom les antres et les bois.
Si tu m’as pour enfant avoué quelquefois,
Que ne me réponds-tu maintenant, ô cruelle ?
France, France, réponds à ma triste querelle.
Mais nul, sinon Écho, ne répond à ma voix.
Entre les loups cruels j’erre parmi la plaine,
Je sens venir l’hiver, de qui la froide haleine
D’une tremblante horreur fait hérisser ma peau.
Las, tes autres agneaux n’ont faute de pâture,
Ils ne craignent le loup, le vent, ni la froidure :
Si ne suis-je pourtant le pire du troupeau.
Joachim Du Bellay, Les Regrets (1558)
Le premier vers est beau. La suite est une complainte de type social sans rapport avec le premier vers, et en decrochage avec lui. Pas très joli ni poétique. Je me souvenais de la belle première ligne, et voulais voir la suite, que j’avais oublié. Déçu. Oui, cela sonne très actuel, sauf que la France d’aujourd’hui est devenue celle de l’Etat providence, pourvoyant au moindre besoin de ses concitoyens, comme semblait y aspirer J. du Bellay en 1558… Drôle…
Bonsoir,
Je souhaiterais avoir votre avis sur le vers de Joachim du Bellay: « France, mère des arts, des armes et des lois,…
S’agit-il de la fabrication des armes blanches et de la façon de s’en servir, c’est-à-dire l’escrime avant la lettre ?
Merci.
Cordialement.
Norbert Pinelli
Tellement moderne !
Comme J. Massart, mais à 75 ans…
Même époque.
Inoubliable souvenir du lycée de Lorient, 1965… Merci Monsieur Emile Lavielle.
En 65 au lycée et je m’en suis rappelé à l’instant…
Oui moi aussi je l’ai récité, et à 78 ans je l’ai toujours en mémoire. Au-delà de la poésie (qui est très belle) le texte est très moderne et très actuel.
Un peu d’oxygène dans ce monde étouffant. Merci.
Cher Jean-Marc DILHAN, c’est bien tout l’enjeu, il n’est pas là question que de chauvinisme mais bien de l’oeuvre qu’entreprend Du Bellay dans le cadre de la translatio studii et qui (malgré la distance que prennent Les Regrets) rejoint cette volonté de faire une Défense et illustration de la langue française. Il faut aussi noter qu’il s’agit bien d’un ethos d’exilé, à l’inverse d’un Ovide. Ce sonnet fait le lit de la partie encomiastique finale et à ce titre l’éloge à une France qui ne répond pas, qui ne peut répondre à la « querelle » prend un côté pathétique plus que nostalgique… La maternité n’est pas douteuse, c’est de la poésie.
Maternité douteuse puisque à l’époque, la mère des arts, c’est plutôt l’Italie, celle des armes, l’Espagne et celle des lois, l’Angleterre. L’exil et la nostalgie expliquent le chauvinisme.
Bonjour,
Petite réponse à Malika : c’est magnifique ce que vous avez écrit. C’est très fort, très condensé. Ca dit beaucoup de choses. J’ai presque envie d’ecrire un article sur tout ce que ça implique.
En plus il y a presque des alexandrins à un moment, on pourrait écrire :
Aujourd’hui, la voici : piquée jusques au coeur,
D’une atteinte imprévue aussi bien que mortelle.
Olé.
Cette France de nostalgie. C’était avant les colonies, avant les débuts de ses follies. Aujourd’hui, la voici, la voilà piquée jusque au cœur, d’une atteinte imprévue aussi bien que mortelle. Puisse la résilience faire son travail et que toutes les sagesses du monde profitent à tous les peuples.
Ce poéme, je l’ai récité lors d’une soirée théâtrale communale sur la scénette de théâtre de mon village natal et à l’oral du Cep. Je l’ai toujours en mémoire. A la mémoire de l’auteur et méditons sur la France de nos jours. Bon vent
Son sonnet « le champ semé en verdure foisonne » a inspiré mon tableau réalisé récemment. Merci ! Grand poète de la pleiade.