C’est le pire de vos enfants
Celui qu’on gâte pourtant
En lui donnant l’illusion
Qu’il dirige la maison
Le mari, le marrant
C’est toujours charmant.
Aux revers de leurs vestons
Ils ont rubans et ferrailles
Que leurs femmes sans plus d’façons
Appellent gaiement des merdailles.
Les maris, les marrants
C’est plutôt brillant.
Ils ont pris ça sur la veste
En faisant de longues siestes
Durant les heures de bureau
Où ils trouvent qu’ils travaillent trop.
Les maris, les marrants
C’est parfois pensant
Tombe la veste les v’là en rade
s’déchaussant sous votre nez
S’relaxant d’une pétarade
Qu’on n’réserve qu’à sa moitié
Les maris, les marrants
C’est plutôt méchant.
C’est là l’envers du décor.
C’est les coulisses du théâtre.
Croyez, c’est trop bien encore
Pour leurs épouses acariâtres
Les maris, les marrants
C’est parfois brimant.
Dès l’instant où se réveille
Le mâle qui en eux sommeille
Ils croient vous donner, tu penses,
De la vie la quintessence.
Les maris, les marrants
C’est plutôt marrant.
Ne leur faites pas la tête
Quand leur viennent les heures tendres.
De toute façon soyez prêtes
Car Monsieur n’aime point attendre.
Les maris, les marrants
Ce n’est point gnangnan.
Ils passent du lit à la table
Sans la moindre arrière-pensée
Vous êtes l’idiote de la fable
de n’pouvoir vous adapter.
Les maris, les marrants
C’est plutôt changeant.
Mais ce que vous n’aimez pas
C’est quand ils font leur bla-bla
Comme une joyeuse comédie
Aux pépés et aux amies.
Les maris, les marrants
C’est parfois bêlant.
Vous connaissez ça par coeur
Les soupirs les tons rêveurs.
Durant ces avant-premières
Vous botteriez leurs derrières.
Aux maris, aux marrants
C’est plutôt tentant.
Eux ils supportent fort mal
Qu’en tout bien en tout honneur
Vous attiriez d’autres mâles.
Ça leur provoque des humeurs.
Les maris, les marrants
C’est parfois touchant.
C’est le pire de vos enfants
Celui qu’on gâte pourtant
En lui donnant l’illusion
Qu’il dirige la maison.
Le mari, le marrant
C’est toujours charmant.
Esther Granek, Portraits et chansons sans retouches, 1976
Tout est dit !
Tellement realiste, rien ne change, un mari reste un mari comme dans ce poeme